Le top 5 des comédies

mardi, octobre 01, 2013

"Sunny"

KANG Hyeong-cheol (2010)





L'avis East Asia

Avec le très réussi "Speedy Scandal", la carrière de Kang Hyeong-cheol s’annonçait déjà prometteuse. Deux ans plus tard, le talent du cinéaste dépasse toutes les espérances avec l’hilarant Sunny.


Na-mi est une élégante femme au foyer quadragénaire qui se consacre exclusivement à sa petite famille, qui l’ignore malgré son investissement. Par hasard, elle retrouve à l’hôpital une amie d’enfance en phase terminale. Celle-ci souhaite comme dernière volonté retrouver toutes ses amies, les « bad girl « du lycée avec qui elles formaient le groupe Sunny. C’est l’occasion pour Na-mi de se remémorer les meilleurs souvenirs de son adolescence et reprendre en main sa vie actuelle. 

Le film puise d’abord sa force dans la qualité d’interprétation de ses personnages féminins. Irrésistibles et attachantes, c’est bien la bande-sonore qui leur confère un charisme indéniable. Chaque morceau utilisé (dont Sunny de Boney M qui donne son titre au film) élève le métrage au niveau supérieur par rapport à sa catégorie et apporte un côté universel qui lui permet de dépasser les frontières locales.

D’une grande maîtrise formelle tant par sa mise en scène que son montage clipesque, Kang Hyeong-cheol aborde frontalement et avec une certaine justesse les divers maux connus mais camouflés de la société sud-coréenne (chirurgie esthétique, harcèlement à l’école, vie familiale difficile, etc.). Cette sincérité à l’humour vulgaire est décuplée par sa dimension politique où l’adolescence des jeunes filles se déroule dans les années 80, période durant laquelle le peuple sud-coréen tend nettement vers le capitalisme américain (une scène culte fait apparaître les forces de l’ordre face aux « révolutionnaires » avec en arrière-plan une affiche de Rocky 4 et en fond sonore Touch by Touch de Joy).

On rit beaucoup, on pleure aussi. "Sunny" est le coup de cœur des années 2010.


Julien Thialon / East Asia.


"Cast away on the moon"

LEE HAN Jae-kwon (2009)





L'avis East Asia

"Cast Away on the Moon" est un ovni : même si la comédie sociale de Lee Han Jae-Kwon comporte un côté fortement dramatique dans sa seconde partie, son idée de départ la place largement au panthéon des comédies coréennes.


Un salarié, dont la boîte vient de faire faillite, est abandonné par sa conjointe faute d’argent. Il tente de se suicider du haut d’un pont le long de la rivière Han. (Mal)heureusement pour lui, il n’arrive pas à ses fins et se retrouve bloqué à quelques centaines de mètres sur une petite île sans issue au milieu de Séoul et de ses 20 millions d’habitants. C’est alors qu’il a un flash : c’est lorsqu’on a tout perdu qu’on est libre de faire tout qu’on veut. Libéré de toute pression extérieure, il commence alors difficilement sa vie de Robinson Crusoé. De l’autre côté de la rivière, une "hikikomori" coréenne (personne n’ayant aucun contact sociale hormis à travers son ordinateur) qui s’invente une vie sur Internet guette ses faits et gestes. Cette rencontre à distance les aide à reprendre goût à la vie et ses plaisirs simples.

Entre voix off interposées et métaphores poétiques, le film met en lumière à travers ces deux personnages le cas du rejet social soit par la peur des autres, soit par l’endettement. Que les lieux soient ouverts ou fermés, le résultat est le même. On rit souvent dans la première partie du film, avec ce Robinson Crusoé au milieu de Séoul qui n’a plus rien à perdre. Ses premiers essais pour pêcher du poisson ou cultiver du blé sont cocasses, l’apogée étant atteinte avec ce livreur qui part en pédalo sur l’île pour livrer des plats de nouilles aux haricots noir appelée Jjajangmyeon, repas petit budget d’excellence du pays. Ce sont ses plaisirs de base que le réalisateur semble prôner avec cette démarche environnementaliste, nous emportant dans cette savoureuse comédie.

Julien Thialon / East Asia.


"Going by the book"

RA Hee-chan (2007)





L'avis East Asia

Même si les comédies romantiques sud-coréennes sont reconnues internationalement comme étant la spécialité du pays des Matins Clairs, d’autres comédies comme "Going by the Book" arrivent à truster les premières places du box-office et offrir aux spectateurs une comédie rafraîchissante loin des sentiers battus.


Sam-po est une petite ville de province en proie à une série de cambriolages que le nouveau commissaire voudrait bien enrayer et par la même occasion lui permettre de redorer son image. Dans cette volonté de médiatisation, il va organiser une simulation de braquage dans une banque. C’est lui-même qui va choisir l’officier Jun-do comme faux-voleur, son côté très professionnel et incorruptible parlant en sa faveur (Jun-do lui collant un PV dès la première scène du film !).

C’est justement ce trait de personnalité qui va constituer le fil rouge comique du film. Une fois le braquage et la prise d’otages initiées dans la plus élégante violence, cet anti-héros qui s’est préparé comme si il était un vrai criminel (avec de jolis clin d’œil à "Old Boy" et aux films de genre), ne va pas hésiter à utiliser tous les rouages du braqueur pour ne pas se faire arrêter par ses confrères de la police, la simulation se retournant contre le commissaire, le message du film pouvant se réduire au proverbe : tel est pris qui croyait prendre. Le plus hilarant sera les différentes simulations du personnage principal pour contenir les plaintes des différents otages qui sont d’excellents personnages secondaires.

Même si les thématiques annexes (censure des médias, corruption, incompétence des services publics) sont abordées sans grande profondeur, Ra Hee-chan les distille avec parcimonie et légèreté grâce à un montage sans longueur ni lourdeur. Combiné à l’originalité scénaristique et un casting alliant éclectisme et excellence, "Going by the Book" insuffle une nouvelle dynamique à la comédie sud-coréenne.

Julien Thialon / East Asia.


"My sassy girl"

KWAK Jae-yong (2001)





L'avis East Asia

Le début des années 2000 est la découverte du public occidental vers les comédies romantiques sud-coréennes. "My Sassy Girl s’impose parmi elles comme l’un des classiques de cette période phare du genre avec le formidable couple que forme dans le film CHA Tae-hyun et Gianna JUN Ji-hyeon. Cette dernière irradie littéralement l’écran par sa beauté mais également son jeu d’actrice avec ses légendaires grimaces et répliques ("Tu veux mourir ou quoi?" ; "Tu le fais sinon si je te tue!"). Par ce côté lunatique du personnage auquel on s’attache inévitablement, le cinéaste utilise habilement son côté rêveur pour parodier la société jugé trop mélodramatique en proposant des fins alternatives aux antipodes des traditions : un régal. 


La narration du récit par le personnage principal, looser au grand cœur, permet de guider le spectateur dans un scénario intelligent qui ne se résume pas à une simple suite de sketchs comme le sera son remake américain six ans plus tard. Divinement drôle et touchant, le réalisateur poursuivra avec un certain succès dans le genre avec "Windstruck" (toujours basé sur un duo) et "The Classic".

Julien Thialon / East Asia.


"Ha Ha Ha"

HONG Sang-soo (2010)





L'avis East Asia

A priori, le cinéma indépendant coréen n’est pas connu pour faire hurler ses spectateurs de rire. Heureusement, Hong Sang-soo est là pour nous dérider un peu. Peut-être pas dans ses premiers films, mais son cinéma s’est au fils du temps apaisé, jusqu’à cet "Ha Ha Ha", au titre révélateur et d’une drôlerie causasse et communicative. Longtemps comparé à Rohmer, le cinéma de Hong Sangsoo évoque maintenant plutôt un croisement entre l’humour de Woody Allen et la sophistication d’un Resnais.


On trinque d’abord à la brillante trouvaille scénaristique du film. Deux amis d’enfance passent un long moment à boire (image fixe et en noir et blanc composée de photos ponctuées de moult «Tchin-tchin, santé ! ») et se racontent à tour de rôle des bouts d’histoires de leur vie, sans se rendre compte qu’ils ont des connaissances communes et parlent des mêmes gens. La femme dont tombe amoureux l’un est par exemple la copine d’un ami de l’autre, et certains de ses actes trouvent leurs explications dans le discours d’en face.

Les deux amis eux-mêmes prêtent à rire : le premier est ainsi présenté comme un cinéaste de Séoul et professeur. Il avoue bien vite lors d’une pathétique scène de drague qu’il s’est fait viré de son poste, et qu’il n’a jamais vraiment réalisé de film. Le second doit sans cesse répéter qu’il est dépressif, mais son air hilare et bon vivant empêche son entourage de le croire. Dans "Ha Ha Ha", les tonitruants éclats de rires qui donnent son titre à l’œuvre camouflent bien souvent une profonde tristesse, et un palpable désarroi. Le tour de force de Hong Sangsoo est d’évoquer cela sans aucune lourdeur, et avec une émouvante justesse dans sa description des rapports humains. Mais loin d’être théorique et désespéré, le film est avant tout une comédie revigorante, où la profondeur rime avec légèreté.

Julien Thialon / East Asia.



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