Les différents usages des masques traditionnels coréens et leurs significations

vendredi, septembre 15, 2017

En vous aventurant dans les rues de Insadong 인사동, le quartier traditionnel de Séoul, vous serez peut être intrigué par de grands masques marrons, parfois rouges, blancs ou noirs, parfois au nez difforme, à la bouche fendue ou encore aux yeux plissés malicieux… et vous vous demanderez peut être, mais qui sont-ils -et pourquoi me regardent-ils ainsi- ?

Masques coréen à Insadong

A travers le monde entier, différents types de masques ont été créés dans le but de représenter l'identité ainsi que les traditions uniques de chaque communauté. En Corée, cette tradition se dit Tal 탈.

Tal, qui est le terme utilisé pour désigner les masques coréens, a une connotation négative. Il est synonyme de malchance, maladie ou difficulté, comme dans l'expression Tali natda 탈이 났다 qui se traduit par “je suis malade” ou encore “j'ai des ennuies”.

A l'époque, les masques étaient perçus comme des objets religieux qu'il fallait vénérer, et donc, d'une certaine façon, craindre. Les Coréens pensaient que le fait de garder un masque trop longtemps apportait malchance et maladie. Ce pourquoi, ils étaient soigneusement conservés dans des sanctuaires ou brûlés directement après utilisation.

L'usage de masques en Corée remonte à la préhistoire. D'abord utilisés comme objets de culte, notamment lors de rites religieux, ils furent ensuite utilisés comme objets artistiques dans des pièces de théâtre combinant danse et musique: le talchum 탈춤.

→ Les masques comme objets de culte

  • Le masque Cheoyong 처용


D'après une légende datant du royaume de Silla (57 av. J.-C.-935), Cheoyong, fils du roi dragon Yongwang avait une femme si belle que les démons eux mêmes la désiraient.  Un soir, alors qu'il s'était absenté de chez lui toute une journée, il rentre et découvre dans son lit deux paires de jambes. Il se rend compte avec effroi, qu'une paire appartient à sa femme, et l'autre paire, appartient à l'esprit de la variole Mamasin. Malgré la situation, Cheoyong ne devient pas fou de rage, il quitte les lieux et s'en va chanter et danser son désespoir. L'esprit de la variole, touché par sa réaction et sa clémence, lui promet de ne plus jamais apparaître face à lui.


Ainsi le visage de Cheoyong a été reproduit en masque et utilisé sur les portes d'entrée, notamment dans les sanctuaires chamaniques, pour faire fuire les mauvais esprits. La légende a également donné lieu à une danse, la danse Cheoyongmu, qui avait lieu le dernier jour de l'an au palais pour faire fuire les esprits malfaisants et souhaiter santé et bonheur à la famille royale.


  • Le masque Bangsangssi  방상시
Le masque Bangsangssi est considéré comme le plus vieux masque de Corée, daté du 5-6ème siècle. Il était utilisé durant les cérémonies funèbres ou bien les exorcismes pour repousser les mauvais esprits, jusqu'au 20ème siècle. Il était généralement enterré près de la tombe du défunt ou brûlé après la cérémonie, du à la croyance selon laquelle les masques apportent malchance.  


→ Les masques comme objets artistiques, le Talchum


Le Talchum, littéralement la danse des masques, était traditionnellement une pièce de théâtre jouée en extérieur. Accompagnés de musique, les acteurs dansaient masqués et jouaient le plus souvent le rôle d'un homme ou d'une femme, mais parfois aussi le rôle d'un animal ou d'une divinité.


Le but était, pour le peuple, de critiquer de façon humoristique la société contemporaine et notamment la bourgeoisie coréenne. Ainsi, les thèmes principaux étaient: la stupidité et les méfaits de l'aristocratie, le triangle amoureux entre un homme, son épouse et sa concubine et l'histoire d'un moine débauché.


Chaque région en Corée possède sa propre version du Talchum et donc ses propres caractéristiques et ses propres masques. On retrouve par exemple dans la région de Gyeongsang du nord, les masques Hahoe qui peuvent être observés chaque année lors du festival de la danse des masques à Andong.


  • Les masques Hahoe 하회



L'origine des masques de Hahoe est marquée par une autre légende. Il est dit que lors du royaume de Goryeo (918-1392), un artisan dénommé Heo vivait dans un village qui souffrait d'une grande pauvreté depuis plusieurs années sans que personne ne sache vraiment pourquoi.

Un jour Heo fit un rêve dans lequel il rencontra l'esprit de la montagne qui lui dit que si les villageois dansaient avec des masques créés par Heo, alors la pauvreté disparaîtrait du village. A la seule condition, que Heo n'ait aucun contact humain avant de finir les masques. Heo ne pouvant ignorer ces instructions se mit à confectionner les masques en veillant à installer une corde autour de son atelier pour que personne ne puisse le déranger.

Presque 100 jours s'écoulèrent. Kim, une femme qui était amoureuse de Heo et avait fait promesse de l'attendre 100 jours, ne pouvait plus supporter d'être séparée de lui. Elle alla donc à son atelier pour voir ce que Heo faisait. Il était en train de finir le dernier masque; le masque Imae 이매, mais au moment où leurs regards se croisèrent, Heo s'évanouit soudainement en crachant du sang et mourut...
Le dernier masque ne fut jamais terminé, c'est pourquoi Imae ne possède pas de mâchoire.


Les personnages dans les masques Hahoe sont: Yangban 양반 (l'aristocrate, le personnage possédant le plus de pouvoir et qui est donc le plus moqué), Kaksi 각시 (la jeune femme, elle joue le rôle d'une déesse dans le premier acte et le rôle d'une jeune mariée dans le dernier), Chung 중 (le moine bouddhiste qui est corrompu et est présenté comme un débauché), Choraengi 초랭이 (le serviteur de Yangban, il est rusé et se moque de son maître), Seonbi 선비 (le lettré, un autre personnage qui a beaucoup de pouvoir), Imae 이매 (le serviteur du lettré qui joue le rôle d'un imbécile heureux), Bune 부네 (la concubine de Yangban ou de Sonpi), Baekjeong 백정 (le boucher qui a mauvais caractère) et Halmi 할미 (la vieille femme).

Nos autres articles

0 commentaires

Le site de l'agence